Sénégal : Karim Wade libéré

Article : Sénégal : Karim Wade libéré
Crédit:
27 juin 2016

Sénégal : Karim Wade libéré

En détention depuis plus de trois années enrichissement illicite et condamné à une peine d’emprisonnement ferme de 6 ans suite au verdit de son jugement du 23 mars 2015, Karim Wade a été libéré dans la nuit du jeudi 23 au vendredi 24 juin 2016. Il bénéficie ainsi d’une décision de grâce Président de la République à son endroit mais aussi à l’endroit des ses compagnons Bibo Bourgi et Alioune Samba Diasse.

Des bruits courraient déjà depuis quelques semaines quant à sa libération prochaine. Le doute s’était d’un coup affaibli avec l’intervention du Président de la République sur RFI et qui, en ces termes « …il ne faut pas désespérer que cela puisse avoir lieu » confirmait ce qui est une évidence aujourd’hui.

Seuls les noctambules ont eu la chance d’avoir eu l’information avant de dormir. D’autres comme moi, n’ont été au courant que le vendredi au matin. Le plus célèbre prisonnier du Sénégal a quitté la maison d’arrêt et de correction de Reubeus très tard dans la nuit, à 1h45 d’après certaines sources.

Ensuite, selon encore des sources, Karim Wade a quitté le pays dans la nuit par vol spécial en compagnie d’un de ses avocats et fidèle de son père Maitre Madické Niang et du procureur général du Qatar.

L’épilogue de cette affaire s’apparente à celle d’une série tragi-comique à bien des égards.

D’abord, l’arrestation de Karim Wade à la suite de la réactivation de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI) jugée alors comme une doléance exprimée par les Sénégalais lors de la seconde alternance politique.

Le procès qui s’en est suivi avait fini par exaspérer pratiquement tout le monde tant il était visible que le droit était bafoué. De plus, l’objet même de la CREI semblait détourné car seul Karim Wade a été inquiété. D’autres dignitaires de l’ancien régime en transhumance dans l’autre camp ont vu leurs soucis dissipés. Pourtant certains d’entre eux figuraient bien comme Karim dans la première liste du procureur de la CREI.

Ensuite, les tractations qui ont eu lieu de la prononciation du jugement à sa libération. Le camp du régime à la tête duquel le Président de la République a toujours clamé sa distance par rapport aux affaires relevant de la justice.

Il était clair dans leurs raisonnements que Karim Wade vivait le sort qu’il méritait. Certains d’entre eux n’avaient pas hésité, au moment du procès avant même que le verdit ne tombe à le qualifier de coupable.

Ainsi, la probabilité d’une liberté avant le terme de la peine paraissait très loin d’être réaliste.

Et, d’un coup, tout a basculé. Les acteurs ont semblent-il changé de position et le discours est devenu moins virulent dans les deux camps.

Enfin, à la stupéfaction de tous, la grâce du Président de la République est sortie. Celui là même qui parlait au début du mois d’une possibilité que Karim Wade soit libre d’ici la fin de l’année s’est vraisemblablement empressé de signer cette grâce pour prendre de court toute l’opinion.

La date également est à plus d’un titre symbolique. Le pays venait de commémorer le cinquième anniversaire de la révolte du 23 juin. Cette date historique symbolise le refus par les Sénégalais d’une violation constante de la loi fondamentale et d’une dévolution monarchique du pouvoir.

Cette date était le début d’un espoir de rupture conquis au prix du sang, un espoir que plus rien ne serait comme avant.

Mais, comme pour nous rappeler que nous n’étions que dans une parfaite illusion, pour nous rendre compte que définitivement cet espoir n’est qu’une leurre, la grâce est sortie à cette date.

Certainement pour nous convaincre résolument qu’eux, les professionnels de la politique, ne fondent qu’une famille. Qu’ils soient libéraux, socialistes, communistes, quel que soit leur horizon, ils ne sont qu’un.

Et, nous prouver à nous autres pauvres Sénégalais que nous ne devons en aucun moment nous mêler de ces histoires de famille.

Une nouvelle fois, les hommes politiques semblent réussir leurs manœuvres mais cette fois, pas au détriment du peuple comme espéré, mais à leur propre perte.

Partagez

Commentaires